[-989 / Début été] Voyage d'un frère et d'une soeur.

Cela fait maintenant plusieurs mois qu'Aménias et Isara ont quitté le lieu qui les a vu naître deux fois, d'abord sous forme humaine, puis sous forme vampirique. Ils marchent d'un pas décidé vers leur destination, même s'ils ne savent pas vraiment quelle est cette destination. Non pas que cela trouble Isara le moins du monde: elle a toute confiance en son grand frère, elle est sûre qu'il sait ce qu'il fait, et elle est prête a aller au bout du monde avec lui. (Le bout du monde est une notion des plus floue pour la petite vampire, mais peu importe, les liens du sang, ou plutôt du Sang, sont les plus forts.)

La lune se lève lorsqu'ils se remettent en marche. Aménias veut traverser la foret qui recouvre le Pentélique, pensant pouvoir trouver une ville de l'autre coté, peut-être Athénes, qui sait. Le fait qu'il ne sache pas vraiment dans quelle direction aller ne le dérange pas le moins du monde. Après a peine une demi-heure de marche, il s'arrête. Isara, qui trottinait derrière lui, s'arrête aussi.

- Qu'est-ce qui se passe, grand frère? lui demande-t-elle de sa petite voix curieuse.

Aménias lui fait signe de se taire, et regarde droit devant lui, le long du petit chemin sur le quel ils voyagent depuis des jours. Quelque chose lui dit qu'ils vont bientôt ne plus être seuls sur la route. Son intuition en l'a pas trompé, car ils peuvent bientôt voir la lueur d'une torche au bout du chemin. Aménias fait signe a sa soeur de le suivre a l'écart.

- On fait comme d'habitude, petite soeur, d'accord? dit Aménias a Isara, qui répond d'un hochement de tête affirmatif.

Tandis qu'Aménias va se cacher dans les fourrés, Isara s'assied au bord du chemin et enfouit sa tête dans ses mains, adoptant la position classique de l'enfant perdue dans la foret et terrorisée, qui ne sait plus quoi faire et s'assoit pour pleurer. Quelques minutes plus tard, la torche arrive a sa hauteur. Elle est portée par une homme dans la force de l'age, qui est accompagné d'un esclave qui porte divers affaires sur son dos.

L'homme fait signe a son esclave de s'arrêter lorsqu'il voit Isara, et il se penche vers elle, curieux de savoir ce qu'une petite fille d'une dizaine d'années peut bien faire dans la foret en pleine nuit. Il pose sa main sur son épaule, semble quelque peu surpris par la froideur du contact, mais essaye de se montrer chaleureux, et il lui parle d'un ton doux.

- Petite fille, dis-moi, que fais-tu toute seule dans cette foret en pleine nuit?

Isara relève la tête, ses grands yeux pleins de tristesse plongeant dans ceux de l'homme, qui ne peut s'empêcher de compatir, et ne remarque donc pas les mouvements furtifs dans les fourrés. En un clin d'oeil, Aménias a surgi des fourrés, bondissant littéralement hors de la végétation. Il atterrit sur l'esclave, qui se retrouve KO pour le compte, et expédie l'homme, tout abasourdi, au pays des rêves d'un magnifique coup de poing en plein visage.

Isara est aux anges, et applaudit l'exploit de son héros de grand frère, qui ne peut s'empêcher de saluer. Après les compliments d'usage de la petite fille en adoration devant son grand frère, nos deux vampires se mettent en devoir de se nourrir. Aménias sur l'homme, Isara sur l'esclave, qui se trouve être un jeune homme a peine moins âgé qu'Aménias. Lorsqu'Isara sent qu'elle a retrouvée quasiment toutes ses forces, elle se tourne vers son grand frère pour ce qui est maintenant devenu un rituel: il lui tend le poignet gauche, qu'elle mord délicatement, et boit deux gorgées du sang de son frère, avant de refermer la blessure d'un gentil coup de langue.

Puis ils reprennent leur chemin, repus et heureux.

Quelques nuits plus tard, nos deux vampires sont toujours en pleine foret du Pentélique. Il marchent d'un bon pas sous la lune, la condition vampirique étant d'une grande aide pour franchir de longues distances sans trop se fatiguer et rapidement.

Au beau milieu de la nuit, Aménias et Isara sont surpris par l'apparition impromptue d'une forme droit devant euex, sur le chemin. Après quelques instants d'observation, c'est Isara qui comprend la premiére ce qu'est la forme qui semble les attendre: c'est une boule de poils plus connue sous l'appellation de louveteau. La pauvre bête semble complétement perdue et effrayée.

Aménias se demande quoi faire, mais Isara, dans une surprenante manifestation de volonté propre, se détache de son grand frère et s'approche du louveteau. Elle marche lentement vers lui, calmement, ses yeux fixés dans ceux du louveteau, jappant doucement. Le louveteau semble se détendre au fur et a mesure qu'Isara approce, tandis qu'Aménias observe sans mot dire.

Finalement, après quelques minutes de jappements et de bruits divers, Isara saisit délicetement le louveteau apr la peau du cou, et le pose dans ses bras. Ledit louveteau semble apprécier, et se blotti contre la jeune vampire, qui semble aussi apprécier le contact.

Isara tient le louveteau tout contre elle, le rassurant avec des petits couinements et jappements, tout en vérifiant rapidement s'il n'est pas bléssé, comme elle le faisait avec les animaux a la ferme. Le louveteau se blottit tout contre elle, rassuré par ses 'paroles', bien qu'un peu étonné de ne pas sentir la chaleur du corps de la petite fille.

- Il est complétement perdu, grand frère... et il s'est bléssé sur des ronces... dit-elle en retirant une aiguille d'une patte arriére du louveteau.

Après quelques instants, Isara ne detecte pas d'autres blessures. Elle caline le louveteau gentiment, continuant d elui adresser des petits bruits sans réelle signification, mais qui calme la petite boule de fourrure.

- Je peux le garder grand frère, s'il te plait? On ne peut pas le laisser tout seul, dans la foret, en pleine nuit... demande-t-elle a Aménias, qui se demande toujours quoi faire.

Finalement, devant l'air quelque peu implorant de sa petite soeur, et la vision du louveteau qui semble se sentir vraiment bien dans les bras de la petite vampire, Aménias acquiesce.

- D'accord, petite soeur. On le garde, au moins le temps de le rendre a sa famille, répond Aménias.

Ils reprennent leur chemin, Isara reprenant sa place aux côtés de son frère, Aménias les menant vers... Il ne sait pas vraiment vers ou, mais en marchant, ils finiront bien par arriver quelque part.

Environ une heure plus tard, ils détectent de nouveaux mouvements dans les fourrés, non loin d'eux. Quelques instants plus tard, deux loups surgissent a quelques mètres devant eux. Les deux ont le poil gris argenté, l'un étant nettement plus gros que l'autre. Les loups se figent en voyant nos deux vampires, puis se mettent a grogner. Isara recule d'un pas, et se dissimule dérriére son frère, tandis que celui-ci se tient prêt au combat si besoin est.

Mais, apparemment, les grognements n'ont servi qu'a appeller un troisiéme acteur, que ni Aménias ni Isara n'avait remarqué. Un troisiéme loup, qui vient se placer devant les deux autres, et se transforme lentement en humain. Il faut un instant a Aménbias pour se rappeller ce que lui avait rapidement dit son Sire a propos des loups-garous, des loups qui peuvent prendre apparence humaine, et qui ne sont pas particuliérement fans des vampires. La situation s'annonce mal...

Tandis que le loup-garou prend forme humaine, Aménias et Isara sentent des mouvements autour d'eux, dans les fourrrés. Il ne fait aucun doute, ni pour l'un, ni pour l'autre, qu'ils sont maintenant cernés par toute une meute de loup. Certains sont même sans doute des Garous. Isara raffermit sa prise sur la jambe de son frére, tandis que le louveteau, qu'elle tient toujours serré contre elle, tremble de tous ses membres, ayant senti la tension, sans en déceler la cause.

Les loups continuent de grogner, mais gardent leur distances, tandis que le Garou finit sa transformation. Aménias réalise soudain pourquoi les loups n'ont toujours pas attaqués, et ne les ont pas encore mis en charpie: a cause du louveteau! Il bénit mentalement sa soeur d'avoir insister pour qu'ils prennent le louveteau avec eux.

Le Garou achéve enfin sa transformation, et fait un pas en avant, les toisant du haut de ses deux métres.

- Nous savons que vous détenez un des nôtres! Rendez-le nous immédiatement! dit-il de sa voix de stentor.

- Nous ne detenons personne, messire, répond Aménias d'une voix qu'il veut forte et sans peur, pour être sur que tous les loups, mais surtout les Garous, dans les environs immédiats l'entende clairement.

- Et qu'en est-il de ce louveteau que cette jeune fille tient dans ses bras? Il fait partie de notre meute! Laissez-le partir! répond le Garou.

- Nous l'avons trouvé non loin d'ici, errant seul dans la foret, visiblement perdu et blessé. Nous l'avons receuilli, en attendant de pouvoir le rendre aux siens, dit Aménias calmement.

Puis il pousse Isara devant lui doucement, montrant ainsi que la jeune fille tient le louveteau tremblant contre elle, dans une position qui ressemble plus a une posture de protection et de réconfort. Aménias continue de pousser sa petite soeur gentiment, lui faisant comprendre qu'elle doit continuer a avancer, pour aller déposer le louveteau aux pieds du Garou, lui-même la suivant de prés.

- Puisque vous dites qu'il est dites qu'il est de votre clan, alors nous avons accompli notre tache, et nous n'avons plus de raisons de le garder avec nous, ajoute Aménias.

A contrecoeur, Isara relache le louveteau, qui hésite un instant, puis se précipite vers un des loups au poil gris argenté qui se trouve aux cotes du Garou, lui faisant la fête. S'en suit une rapide explication en langue lupine entre le louveteau et le gros loup, qui se revele être une louve. Probablement la mere du louveteau. Finalement, le Garou sous forme humaine semble satisfait, et se tourne vers nos deux vampires.

- Il semblerait que vous ayez dit vrai. Serait-il possible que tous les vampires ne soient pas des êtres barbares assoifés de sang? demande-t-il de sa voix tonitruante, mais qui semble beaucoup plus douce aux oreilles de nos deux vampires.

- Il ne faut pas juger simplement sur l'apparence, messire, se contente de répondre Aménias, faisant évidemment référence a l'apparence du Garou avant sa transformation.

- Cela est vrai, répond le Garou.

- Vous avez aidé l'un des notres. Même si ce n'est qu'un jeune louveteau sans cervelle, il n'en reste pas moins que, sans vous, il n'aurait peut-être pas passé la nuit. Nous avons une dette envers vous.

Aménias se contente de hocher la tête, tandis que Isara garde son regard braqué sur le louveteau, qui semble l'avoir complétement oublié, tout a sa joie d'avoir retrouvé sa mére et les siens.

Le Garou tend a Aménias une dent blache, qu'il a enlevé du collier qu'il a autour du cou, collier que les vampires n'avaient pas remarqué avant.

- Prenez ceci. Si vous avez besoin d'un coup de patte, cela servira de preuve de la dette que la Meute a envers vous, ajoute le Garou.

Aménias prend la dent, et al range dans une poche, tandis que le Garou reprend sa forme lupine. Quelques instants plus tard, toute la bande de chasseurs lupins a disparu dans les taillis.

Aménias et Isara se regardent, ne sachant que penser de cette rencontre aussi étarnge qu'innattendue. Finalement, aprés un haussement d'épaule, Aménias reprend la marche, suivi de prés apr sa petite soeur, qui pense au louveteau, et qui espére qu'il se souviendra d'elle, même s'ils ne sont pas restés ensemble longtemps.

Aprés plusieurs heures de marches silencieuse dans la foret, ils se cherchent un coin tranquille, un peu a l'écart du chemin, pour se reposer durant la journée sans être dérangés. C'est Isara qui se trouve la cachette idéale, sous la forme d'un trés vieil arbre au tronc vide.

Avec l'aide de son frére, ils agrandissent le trou qui permet d'entrer dans l'arbre, rognant un peu le bois legerement pourri, jusqu'a ce que la jeune fille puisse se glisser a l'intérieur. Il fait frais, voir un peu humide a l'intérieur du tronc d'arbre, et extremement sombre. Elle se pelotonne au fond, baille un peu, tandis que son frère la recouvre les vetements qu'ils ont pris a des voyageurs rencontrés quelques jours plus tot dans la foret, tachant de la recouvrir entierement pour eviter qu'un rayon de soleil qui passerait par le trou ne la touche.

- Dors bien, petite soeur, dit-il tendrement.

- Bonne nuit grand frère, répond-elle.

Puis Aménias entreprend de cacher au mieux l'entrée de l'arbre avec des branchages et des feuilles, avant de se fondre dans la terre au pied de l'arbre.

Lorsque le soleil se léve sur la foret, nos deux vampires sont profondément endormis dans leurs cachettes respectives, a l'abri du soleil et de tout le reste.